Quand RFF et la SNCF jouent à Madame Irma

Publié le par cercledeburrunz.over-blog.fr

Malgré un fret en déclin depuis 30 ans, des prévisions de trafic sans cesse démenties par les faits, un déficit plus important que celui du trou de la Sécu, les promoteurs s’entêtent à démontrer que la ligne existante n’est pas suffisante.

Pourquoi dépenser plus d'un milliard d’Euros pour construire une nouvelle voie ferrée entre Bayonne et Hendaye alors qu’il en existe déjà une, sous-utilisée ? Nombreux sont ceux qui se posent cette question toute simple. D'après les prévisions de RFF (Réseau Ferré de France) et de la SNCF, la ligne actuelle sera saturée en 2020, en raison de l’augmentation du trafic marchandises.

Ce diagnostic est-il exact ? Les membres du Cercle de Burrunz ont voulu pour s’en assurer le passer au peigne fin. Ils l’ont fait avec d’autant plus d’attention que les Promoteurs de ce projet sont à la fois juge et partie. En effet, RFF et la SNCF ont tout intérêt à démontrer que la ligne sera saturée puisque le développement et l’exploitation du réseau est leur raison d'être : « Les promoteurs de nouveaux projets sont bien évidemment favorables à ces projets. Consciemment ou inconsciemment (ils) sont tentés de (les) présenter sous un angle favorable » notent les auteurs d’une étude du Conseil d'Analyse Economique auprès du Premier Ministre.

Cette pratique est semble-t-il monnaie courante dans le domaine ferroviaire puisque la même étude nous apprend que sur 27 récents projets ferroviaires, 37% ont été surestimés. Le record est détenu par la ligne Saint Germain-en-Laye - Noisy-le-Roi : inaugurée en 2004, elle transporte 1600 passagers. La Sncf en avait prévu 10.000. De l’intérêt de surveiller ses prévisions !

Tout indique que celles concernant le fret entre Bayonne et Hendaye ont été surestimées de la même façon. C’est en tout cas le constat d’experts indépendants (S.M.A., Bureau d’expertise suisse, Zürich décembre 2006), saisis par le président de RFF. Ils ont examiné les prévisions des Promoteurs. Leur rapport conclut à la non-saturation de la ligne actuelle. Le graphique (p.3) est édifiant : à partir de 1998, les chiffres du fret sur rail démentent, année après année, les prévisions. Pourquoi un tel écart entre les prévisions de la Sncf et la réalité ?

Prévisions « gonflées »
Et pourquoi ce « déni du réel » ? Pourquoi engloutir un milliard d’euros pour une ligne presqu’exclusivement destinée au fret alors que les entreprises délaissent ce mode de transport tous les ans un peu plus ? Mais imaginons  un  instant  que ces prévisions s’avèrent correctes.  La ligne actuelle où passent 52 trains par jour (voyageurs et fret) peut en accueillir 264 ! Et, selon les experts suisses du Débat Public, elle pourra acheminer tout le trafic (surestimé, rappelons-le), que RFF prévoit de faire passer en 2020 ! Pour donner du poids au projet et tenter de convaincre que la ligne existante est saturée, on « gonfle » donc les prévisions de trafic.

Les chiffres sont têtus !
Mais on triche aussi sur le trafic existant. Ainsi, entre Bayonne et Hendaye la SNCF avance le chiffre de 64 trains par jour. Un simple clic sur son site internet montre qu’il n’en circule que 33 !
Enfin, il ne faut pas oublier qu’on n’est jamais aussi généreux qu’avec l’argent des autres. En effet, faute de moyens suffisants, les Promoteurs du Rail doivent faire appel à des concours financiers extérieurs pour réaliser leur projet : Union européenne, Etat, régions, collectivités locales et même capitaux privés. Aucune de ces deux entreprises publiques ne pourraient survivre sans les subsides qu’elles reçoivent.
Il est donc logique qu'elles invoquent l’urgence du projet et le présentent de la façon la plus séduisante possible pour appuyer leurs demandes de crédits et de subventions. Mais les chiffres sont têtus : le déficit de la SNCF est de plus de 13 milliards d’Euros par an. Plus que le « trou de la Sécu. » !

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